Je publie avec l'accord de mon fils Vivien, les lettres journalières que je lui ai adressées. Cela est probablement une forme d’exhibitionnisme, mais aussi un partage thérapeutique.

mardi 10 mai 2016

dix huitième lettre



samedi 24 janvier 2015

Où allons-nous te retrouver ?
 Hier tu fuguas de ton lit, la fugue ne fut pas longue. Ne possédant plus la marche, tu te vautras sur le sol. Tu fis peur à tout le personnel du service. Il te retrouva gisant par terre. Les fils qui servent de jonctions avec les écrans de contrôle se détachèrent et les alarmes se déclenchèrent.
Donc, pour plus de sécurité, tu dors sur un matelas à terre. La chute aura moins d’amplitude. Ton instinct de liberté est en partie dû à une envie de « chier ». Tu ne supportes pas de faire dans ta couche. C’est horrible pour toi, malheureusement tu n’as pas le choix.
L’après-midi d’hier fut d’une telle tonicité que nous en ressortîmes exsangues. La première partie fut agréable, nous communiquâmes, jouâmes à divers jeux comme le bras de fer, et le dépose bisous. Tu parlas au téléphone avec ta sœur, et Gwendal réussit à créer un énorme sourire. Tu acceptas que ton père prenne une photo.
 Tu posas et eûmes droit à un joli sourire. Nous nous serions presque crus à un dimanche à la campagne. Puis une envie de « chier » subite interrompit la phase idyllique.  Notre retour ne fut pas le plus heureux. Tu nous expulsas de la chambre en utilisant un vocabulaire à choquer un charretier. Je résistais, puis influencé par mes chastes oreilles, je bâtis prudemment en retraite. Ta mère téméraire décida d’affronter la tempête verbale. La puissance du regard et la force des mots la précipitèrent à la côte où elle ne trouva pas de refuge.
Lundi matin, je croise les doigts, tu quittes Marseille en direction de Rouen. Ainsi nos longues traversées en TGV  se terminent. Jean est arrivé, et ta mère a enfin trouver du réconfort. Cela va lui faire du bien, car avec toutes les claques qu’elle se prend, elle à la tête dans le même état qu’une pomme de terre passée dans un presse purée.
Aujourd’hui une grosse journée nous attend. Va-t-elle nous attendre ? Je la sens impatiente de démarrer alors que nous ne sommes pas encore réveillés. Je la vois qui s’échappe. La garce si elle ne nous attend pas, nous aurons toujours un jour de décalage avec toi. Ouf ! Je viens de l’attraper. Elle est solidement attachée et ne peut plus bouger. Pourtant au fond de moi, j’aurais aimé qu’elle s’échappe. Je stresse de la vivre. Aujourd’hui tu auras de nombreuses visites. Ugo et ses parents débarquent, Sylvie une ami de Jean et de Fabienne aussi. Trop de monde pour ma petite tête qui est déjà encombrée de trop d’interrogations mêlées à une peur viscérale. Mais quel importance si cela peut d’apporter un peu de baume.
Voilà pour aujourd’hui. Il est sept heures trente. Je remonte m’allonger et attendre. Je veux fermer les yeux et ne les ouvrir que lorsque tu seras guéri. Je ne suis pas certain d’avoir la force et la patience qui me permettront d’affronter toutes les traquenards et les chausses trappes qui sèment le chemin de ta convalescence. Quel égoïste je suis. Par rapport à toi, ce que je ressens n’est que de la pacotille. C’est sûrement toi qui aimerais fermer les yeux et être guéri par un coup de baguette magique.
La baguette existe, c’est toi qui la possède et à notre grand regret elle n’est pas magique. Elle est faite de souffrances, de combats, de ténacité, de tonicité, de volonté, de courage, de témérité… et nous ne sommes que spectateurs de ta lutte.
Bisous

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